mercredi 5 juin 2013

Mon gentil patron triste


  1. Cher Monsieur Freysinger,
    A chacun sa culture, et on dit la vôtre très étendue. De mon côté, je n’ai jamais rien compris, entre autres, à Kant ou à Hegel, mais je connais un peu Gérard Lenormand.
    Votre article dans Le Nouvelliste du 27 mai 2013 m’a fait spontanément penser à une chanson interprétée par cet artiste. J’ai juste remplacé «dauphin» par «patron», puisque vous êtes le chef du département dans lequel je suis un employé.
    Vous vous plaignez des «médias qui sont devenus, tout en un, tribunal, échafaud et pilori», et pour vous justifier, vous énoncez des exemples. Cela m’amène quelques commentaires. Je tiens à préciser que je ne vous connais que très mal, n’ayant jamais lu aucun de vos livres et n’ayant, de mémoire, jamais suivi un débat au cours duquel vous vous exprimiez.
    Le rapport que vous faites entre médias et décideurs me semble laisser de côté un point central : les médias font les décideurs. Certains personnages politiques l’ont bien compris et sont omniprésents dans les médias. Du coup, tout le monde les connaît et leurs chances d’être élus sont décuplées. Si vous ne voyez pas de qui je veux parler, j’ai des noms (et en tout cas un) à vous proposer.
    Les médias ont montré une photo de vous avec un drapeau, une interview de vous parlant des enfants sans-papiers, ont fait un article sur vous invitant versus 13 à l’apéro, ont relayé une statistique criminelle que vous avez donnée, vous laissent une place dans la Tribune des Politiques. Quel est leur tort ? Où est la manipulation ? Devraient-ils taire tout ce que vous dites ou faites ?
    Quant à l’interprétation de ces divers faits, je pense que quiconque a vu votre drapeau, a entendu vos déclarations sur les enfants sans-papiers, a lu la charte versus 13, n’a pas besoin des médias pour se faire une opinion. Tout le monde a compris que vous êtes gentil comme un dauphin et que les requins du système politico-économico-médiatique actuel veulent vous démolir, vous, mon gentil patron triste.
    Dans le même journal du même jour, Jean-Yves Gabbud vous cite, expliquant la méthode de communication de l’UDC : «La polémique ? C’est le moyen qu’on a utilisé pour qu’on parle de nous. Tu donnes l’illusion au journaliste que t’as dérapé et hop, il parle de toi et t’as gagné.» Etonnant pour quelqu’un qui critique le système politico-économico-médiatique, qui utilise les termes « manipulation »« malveillance »… A moins que vous n’ayez jamais dit cela et qu’il s’agisse à nouveau d’un mensonge journalistique.
    Je terminerai avec une citation d’un auteur contemporain que je fais mienne : «Que les vrais démocrates de ce pays soient rassurés : je résisterai»… et j’espère bien ne pas être le seul.